30 juin 2009

Deux poids et deux mesures


Un mois après la féria de Vic, il ne me semble pas inutile de revenir sur ce qui a constitué le débat du week-end, la comparaison entre le toro de Palha et celui de Victorino Martín.
Nous avons ici immédiatement pris fait et cause pour le palha, pour ce qu’il a pu représenter, ce qu’il portait en lui.
Évidemment, 'Camarito' n’était pas parfait, loin s’en faut, et il peut y avoir débat. Il doit y avoir débat, notamment sur le fait qu’il dut être longuement sollicité avant de s’élancer. Personne ne le conteste. Mais ensuite…
Ce que je trouve assez affligeant c’est la soupe que l’on tente de nous servir en présentant le victorino comme un toro complet dans tous les tiers. Comment peut-on en effet qualifier de complet un toro dont la force ne lui a pas permis de supporter une pique normale malgré quatre rencontres que l’on est bien obligé de qualifier de symboliques ?

Ceux qui vantent le victorino, toro moderne de troisième tiers, n’ont généralement vu en 'Camarito' qu’un toro violent au cheval, un toro spectaculaire. A en croire ces raisonnements c’est ce côté violent et spectaculaire qui a fait son effet, quasiment pervers, sur les gradins. Et c’est à peu près tout. Il en découle comme une gêne, ou un malaise. De la violence, du spectaculaire qui plait aux étagères, du vulgaire, du pornographique même. Ce n’est pas dit ainsi mais ça transpire. Je vous avoue trouver cela curieux.

Les mêmes qui habituellement vous expliquent que « mon bon monsieur, c’est ainsi, ce sont les goûts du public, on y peut rien, il faut l’accepter puisque le public décide… », n’acceptent pas aujourd’hui que le public décideur (sic) ait préféré la puissance et la force du palha – oui la force ! – à l’aspect soi-disant plus complet du victorino
Je persiste, et j’écris bien « soi-disant », car comment considérer comme complet un toro sans la force nécessaire pour supporte un tercio de varas digne de ce nom, en corrida concours qui plus est ?
Et puis, de vous à moi, un toro puissant et sauvage, je préfère l’imaginer violent que docilement soumis ou bêtement noble.

'Camarito' s’est arrêté assez rapidement après le début de faena. Deux séries, pas une de plus. Et les savants nous expliquent que c’est par manque de moral et non par manque de force. J’avoue ne pas savoir. On n’est pas obligé d’avoir un avis sur tout.

Je voudrais juste que les savants méditent sur cette photographie de Yannick Olivier où l’on voit 'Camarito' s’élancer pour la troisième fois. Regardez les blessures, regardez le sang jaillir, gicler à gros bouillon. 'Camarito' a été saigné, cela est incontestable.
'Camarito' je ne sais pas, mais le victorino j’en suis certain. Après pareil châtiment, ce n’est pas après deux séries qu’il se serait arrêté. C’eut été bien avant, avant même la première paire de banderilles vers laquelle il n’aurait pas eu la force de s’élancer, pas même la force d’y penser.

C’est bien de comparer. Encore faut-il qu’il n’y ait pas deux poids et deux mesures.