20 septembre 2009

Toros y vinos... à Mirandilla (V et fin)


Septembre est évidemment la période des vendanges et l’occasion pour nous de conclure avec Fabrice Torrito la série Toros y Vinos à Mirandilla. Avec Fabrice mais également avec la maison Krug qui est descendu en Andalousie pour y déguster rien de moins que le Clos du Mesnil 1995. Nous laissons la parole à Fabrice qui va nous parler d’une légende champenoise.

Sur la photographie ci-contre, Fabrice est en compagnie de l’œnologue de la maison Krug.

• c’est un champagne « pur sang », sans assemblage. Même parcelle de vigne, même cépage, même millésime, ce qui est très rare dans l’élaboration d’un champagne. Peut-être comparable à la consanguinité normalement pratiquée dans une ganadería, en mesurant tout de même ses effets pour éviter une dégénérescence de la race ;
• c’est un produit hors-norme. On a l’habitude de dire en parlant des produits de Krug que ce n’est pas du champagne. Des personnes n’aimant pas le champagne, peuvent apprécier du Krug. C’est un produit à contre courant commercial, comparable à un éleveur de bravos qui fait du toro encasté, puissant et avec beaucoup de tête. Ces bêtes ne sont pas facilement vendables, mais un public d’aficionados connaisseurs les recherchent ;
• la part du marché de Krug, est une goutte de champagne dans la production totale ;
• c’est un produit très typé, reconnaissable entre tous, très facile pour une dégustation à l’aveugle ;
• les méthodes de production, d’élaboration et d’élevage sont traditionnelles (élevage en fûts de chêne). C’est le taureau « de toute la vie », né de la monte d’une vache par un étalon, en pleine nature. Pas de techniques modernes ;
• Krug possède des réserves de « vins clairs », qui est la substance régulatrice qui permet d’uniformiser le goût des produits de la maison. Cela peut se comparer à un étalon qui « transmet » bien, ou une lignée (reata) bien définie qui assurent la continuité des caractéristiques morphologiques et de comportement des toros d’un élevage
• le palais de la maison est assuré par Olivier Krug, cinquième génération d’éleveur, qui continue d’assurer le « goût » et la griffe Krug. Dans un élevage de taureaux, la décision de sélection ne peut appartenir qu’à une seule et unique personne, le ganadero, qui appliquera ses convictions. On pourrait discuter longtemps sans jamais se mettre d’accord sur le comportement d’une génisse en tentadero

Conclusion :
• il semble que c’est bien le consommateur qui régule le marché du vin, alors que le marché de la corrida est totalement aux mains des figuras et de leurs managers. Le public aficionado, dans le choix des élevages n’a que très peu de poids, exception faite de programmations rares et originales comme à Céret ;
• un vin élevé de manière traditionnelle, avec une philosophie de qualité, de caractère bien trempé et de rareté, parvient à se monnayer très cher, ce qui n’est le cas semble-t-il que chez Miura et surtout Victorino (quoique la rareté du produit chez ce dernier est aujourd’hui relative, avec 25 corridas lidiées par temporada) ;
• un éleveur de vin ou de toro doit-il s’adapter aux lois du marché de consommation ou garder sa ligne directrice de sélection ? Doit-on faire du taureau ou du vin pour vendre ou pour se faire plaisir ? Les deux aspects sont-ils compatibles ?