22 février 2010

Hernández Pla au panthéon ganadero


La nouvelle est tombée, l'air de rien, via le blog, vendredi soir dernier. En nous l'apprenant de la sorte, Laurent avait simplement souhaité nous prémunir du choc, ne pas nous accabler ; l'émotion serait moins vive, plus diffuse — agir avec tact, comme il convient envers les amis.

Et puis il y avait cette délicate attention, sous la forme d'un superbe semental Coquilla de Mariano Cifuentes, qui voulait nous dire qu'il ne fallait pas désespérer, que Santa Coloma, même privé d'un de ses élevages emblématiques, ne devait pas être enterré trop vite.

Élevage porte-drapeau alors même que des décennies de sélection consciencieusement menées avaient bel et bien fini par façonner un toro reconnaissable entre tous, afin que nous n'ayons plus d'autre choix que de l'appeler par son nom : un hernández pla.

Sonné, j'ai encaissé le coup en serrant les mâchoires ; « la hache » à la devise tricolore figurant parmi les ganaderías fétiches qui nourrirent sans relâche mes rêves de jeune aficionado — celui qui s'imaginait en selle à « Soto Gutiérrez » veillant sur un lot d'estampes cárdenas prévu pour Las Ventas.

JotaC aussi a accusé l'uppercut ; pour sûr qu'il était rudement en colère. Et triste. Il n'est, pour s'en convaincre, qu'à lire son message — un drôle de requiem — que j'ai souhaité vous faire partager, histoire peut-être de soulager des cœurs aficionados peinés de voir ces toros partir... à la dérive.


Si les toros de Hernández Pla disparaissent, j'arrête la tauromachie... Non ! Sans dec', là je crois que je vais vraiment pleurer. Putain de putain !!! La vie est une chienne avec un collier à clous retournés autour du cou. Le Jarama, la sablière, la noria de camions, le campo le plus moche du monde — Ciempozuelos —, l'humidité et le brouillard et... les toros.
Ces toros au regard souligné de rimmel, aux cornes fines comme des lames de Tolède, au caractère trempé dans l'acier des tempêtes.
Hernández Pla, bordel ! Je n'irai plus aux arènes.
Hernández Pla, la photo de David Cordero avec ce pauvre Aurelio García qui fait un soleil accroché à l'encolure de 'Quick' — quel bordel en piste ce jour-là ! Pas un mais quatre ou cinq batacazos, des chevaux abandonnés, seuls, sans cavaliers. Bonijol et Esplá pour sauver les montures ; Anderson Murillo qui fait dans son froc. Et nous tous, le cœur aussi Céret que les fesses.
Hernández Pla, bordel ! C'est la fin du monde.
Celui qui a vu cette course se la rappellera toute sa vie. Pauvre Serafín qui maudissait ses « putains de toros » à chaque phrase. Et plus il les insultait, plus on sentait le respect qu'il leur portait. Pauvre Serafín, pauvre Hernández Tabernilla… Pauvres cons qui ne savent pas s'entendre lors des successions ! Pauvre de nous, qui y perdrons notre âme…
Ne me parlez plus de José Tomás ou de qui que ce soit d'autre. Tant que les figuras n'affronteront pas ce type de toros, elles resteront des novilleros de seconde zone, des « danseuses de cabaret » et rien d’autre. Demandez plutôt à Manuel Jesús, il vous racontera 'Guitarrero', il vous racontera San Isidro 2002, le fracas dans le peto, le canasson au tapis, le boucan des gradins et la vuelta posthume. C’était hier.
Les mecs, je déconne pas, je sens que je vais faire une bétise. Tiens, je vais bouffer un cheval, un bourin, un gros, un tout entier, avec la selle et les harnais, et les sacoches… Je n’ai rien contre les carnes, c’est juste pour passer mes nerfs. Vengeance ! Sus à la société Horsebull ! Du horse, du horse, du horse… ça va ! Maintenant, on a les boules…
Je vais faire ça, sinon je pleure. Je préfère bouffer Rocinante. Il n’y a plus de plaza pour Don Quichotte.

JotaC


Images Evoqué par JotaC, un batacazo dantesque lors de la tarde du 11 juillet 2004 à Céret. 2004 (voire 2005), année où furent combattus les derniers toros de l'ère José Antonio Hernández Tabernilla. Après… © David Cordero 'Guitarrero', honoré d'une vuelta al ruedo le 12 mai 2002 à Las Ventas : un exemplaire typique de l'ère José Antonio Hernández Tabernilla. Après… © Juan 'Manon' Pelegrín