13 septembre 2010

Sombre dessein


Les immeubles en construction et du matos de chantier qui traîne un peu partout. Le ciel jaune et la terre rouge. Le vent brûlant qui frappe brutalement les tôles de ce hangar sordide et ce tas de gravats, juste là. Il y a aussi, ce corps lourd, froid et poussiéreux, et l'idée pesante et puante d'un truc pas vraiment clean là-dessous. El Pimpi, le picador, gît tristement dans sa fleur pourpre, seul, perdu, loin.

Plus loin, plus tard, hier, rendez-vous du gratin pour soirée à la fleur d'oranger... La foule exulte, les enfants rient, les hommes trinquent et les femmes sont belles, El Juli est "número uno", Morante est "único", Cid is back et Victoriano del Río est chéri de la belle à l'oeil noir. L'on coupa tout ce que l'on pouvait couper, et l'on m'a dit que ces toros étaient des braves. On les gratifia de vueltas al ruedo, pour honorer leur dépouilles de terreurs, mais l'on ne saura jamais ce qu'aurait été vraiment cette tarde, si ces toros s'étaient en fait pointés au rendez-vous des couillus, des durs du teston, des vrais Braves. Il aurait suffi de les piquer, deux fois au moins, et d'une manière raisonnable, juste raisonnable, pour le savoir. L'histoire d'un triomphe s'écrit aussi à coups de ferraille. Pourtant, cette date bien qu'exagérément amputée d'un tercio, sera désormais "Historique". Elle aurait pu n'être que "bonne", mais on la voulait "Historique".

Je ne souhaite pas gâcher la fête, mais je ne sais que trop bien que les essais même les plus géniaux ne valent rien, si la passe décisive est en-avant. Voilà, l'idée d'un simple petit en-avant dans le processus peut parfois vous rester en travers du gosier, car si le geste reste beau et la prestation valeureuse, le point n'est pas compté, le planchot est bloqué et le match est perdu. C'est tout. Un toro est Brave quand il saisit avant tout l'opportunité de passer l'épreuve du fer. C'est ainsi qu'on put dire combien Braves de chez Braves furent les 'Camarito' et autres 'Clavel Blanco'... Les autres, ceux qu'on ne m'a pas montrés, ne le sont pas, ou peut-être pas. La Bravoure n'est pas affaire de suggestions ou suppositions. Seuls ceux qui vont à la guerre sont des guerriers.
Il y a les rumeurs, les détails et les faits.
Alors, coupez tout ce que vous voulez couper, mais laissez Dame Bravoure là où elle est, et ne la voyez pas là où elle n'est pas. La pauvre a déjà bien trop souffert de tant de légèreté et voudrait seulement partir en paix.

Samedi, El Pimpi est mort, et plus loin, plus tard, hier, c'est l'Art de piquer les toros qui mourait aussi... un peu plus.