08 juillet 2011

Faenas de carpintero


À Pampelune les toros ont la bougeotte. De leurs fincas respectives ils commencent par être débarqués aux Corrales del Gas. De là, sur le coup de 22 heures la veille du combat, ils quittent leur confortable appartement pour aller passer la nuit dans un bien plus sommaire, les Corralillos de Santo Domingo ; c'est l'encierrillo. Le lendemain matin à 8 heures pétantes ils participent à l'encierro au cours duquel à vive allure et encadrés par leurs cousins cabestros ils sont invités à rejoindre les corrals de la plaza — non sans avoir préalablement bousculé, piétiné voire encorné quelque piéton inconscient ou tout simplement malchanceux. Quatre heures plus tard l'apartado dispersera la fratrie pour toujours.

En dehors des opérations de débarquement et de mise en chiqueros, aucun transfert des toros ne serait possible en l'absence du vallado1, autrement dit la clôture en bois. Dès le début du mois de juin, les employés de la menuiserie Hnos. Aldaz Remiro, de Puente la Reina (Navarra), installent les éléments du tronçon de l'encierrillo et des Corralillos, éléments qui resteront en place durant toute la durée des San Fermín. En revanche, les 64 « menuisiers-charpentiers » abattent un boulot titanesque les jours d'encierro dans le Casco Viejo ; tous les matins entre 5 et 6 heures ils montent la clôture du parcours, et tous les matins, une fois l'encierro terminé, la démontent ! Inutile de préciser que la « petite armée » en gilet beige passent beaucoup plus de temps à dresser la clôture qu'à la faire tomber...

L'armature du vallado dans son entier (encierrillo + Corralillos + encierro) se compose de 900 piquets2 (de 30 kg chacun), 2 700 grosses planches, 200 palissades, 2 400 cales, 2 000 vis et 40 portes environ, dont l'une est d'un genre très spécial : la puerta de Estafeta. Située dans la Curva, entre Mercaderes et Estafeta, il s'agit d'une authentique porte, fort large et plutôt lourde. Depuis 1987 les toros viennent y frotter cuir et cornes suite à une glissade ou un virage mal négocié ; depuis 24 ans elle se referme après le passage du dernier toro ou cabestro. Poussée par plusieurs gilets beiges mais commandée depuis toujours par Alfredo Macuso Amadoz, la porte d'Estafeta empêche et les cornus braves ou mansos de revenir en arrière et les coureurs des secteurs Ayuntamiento et Mercaderes de poursuivre la manade dans Estafeta. Malgré une expérience incomparable, il arrive parfois à Alfredo d'ordonner sa fermeture un peu précipitamment, comme cela s'est produit hier...

1 Là où il n'y a pas de murs (rares trouées dans Santo Domingo, Ayuntamiento, La Curva, Telefónica et Callejón), il y a le vallado, constitué de deux barrières (intérieure pour les coureurs, extérieure pour les spectateurs) formant un couloir qu'occupent les secouristes, les agents de la sécurité, les photographes et... les coureurs qui y trouvent refuge.
2 L'emplacement d'un piquet du vallado est matérialisé au sol par une trappe métallique.

Liens Vidéos Vallado 1 & Vallado 2 ; vidéos Puerta 1 & Puerta 2 Une galerie du Diario de Navarra.

Images Détail du vallado © Laurent Larrieu / www.camposyruedos.com Signe des temps, pour la première fois une partie du vallado est issue de forêts navarraises (pin sylvestre) gérées durablement — à titre d'exemple, 8 à 10 piquets sont étrennés chaque année.