29 mai 2012

À un détail près


À cette heure-ci, les mamies vicoises retrouvent enfin la pesante quiétude des caniculaires après-midis gascons, parce que le muret sent un peu moins la pisse et que le petit nain dans le jardin est toujours là, sain et sauf. Elles vont pouvoir retrouver le sommeil qui leur est dû, et ne sursauteront plus sous la couette au moindre couac de trompette. Vic 2012 s'est endormie, et, ma foi, la terre tourne encore dans le bon sens. 

Après cette fin du monde promise, ce cataclysme annoncé, je dois admettre que ma gueule de bois fut bien relative. Sur tous les fronts, Vic 2012 en valut finalement bien d'autres, car chacun de mes souhaits éthyliques fut abondamment servi frais, dans une ambiance gersoisement amicale. Mais, question bêtes à cornes, le Tariquet du premier soir ne suffit pas à masquer la touche citronnée du jour suivant. 

Sur un cartel enchanteur, censé faire ronfler les cuivres, l'on oubliera vite comment El Fundi lavait dignement la claque madrilène dans un Gers qu'il quittait à jamais, mais on retiendra surtout l'indignité de ce lot de José Escolar qu'on ne voulut pas regarder faute de mal de bide, surtout parce que cela ressemblait à un spectaculaire doigt tendu haut et fort à tous ces cons que nous étions d'avoir voulu faire l'effort d'y croire encore, et supporter les tracas d'un CTV qu'on s'était imaginé plus soucieux d'une autre éthique en ces jours délicats. On se trompait, tant pis pour nous, couillons… Mais, puisque nous en parlons, il serait bon de savoir qui a bien pu cautionner un tel embarquement ? 

A) Des aficionados défendant une piquante idée de la corrida de toros
B) Des entrepreneurs soucieux de faire fleurir leur marché à renfort de coups de génie et d'audace prompts à re-séduire un amour perdu ? 
C) Une équipe de gougnafiers qui se fout pas mal du clientèliste respect que des aficionados doivent aux aficionados ? 
D) Obiwan Kenobi ?

À vous d'y répondre… Moi, je n'ai fait que payer ma place, et, ce jour-là, elle pesa lourd dans mon budget. Il n'empêche que, le matin du grand bilan, qui se fera forcément au pied du mur, malgré nos têtes de nœuds incrédules, nos langoureux abrazos et nos tapes fraternelles dans le dos, nous serons là pour vous rappeler que, ce jour de mai 2012, la belle et grande corrida de toros prit un coup de pied au cul supplémentaire, un de ceux qu'on cherchera tous à oublier le jour des obsèques, mais que tout le monde gardera planqué dans la cave ou le grenier avec l'amère certitude que, dans cette affaire, les antis n'y furent pas pour grand-chose.


Photographie Karla Pradet