28 août 2012

Champ de ruines


De minces filaments, éphémères, fuyants, fleurissent ma nuit qui roule sur la vitre. Des hommes et des femmes, et des enfants c’est sûr, vivent là, infimes halos, poussières bientôt endormies.

Le feu d’artifice est fini. Bilbao fume étrangement comme s’il lui était arrivé malheur. La mémoire d’un aficionado doit ressembler à ça : un édifice de fumée volage que le ciel aspire comme le temps. Un champ de ruines que l’on affectionne de parcourir, souvent, toujours, inlassablement.

Que restera-t-il de cette corrida ? Des toros d’une présentation moyenne pour le lieu, mais pour ça le temps fera son œuvre, deux vraies alimañas à l’ancienne (2° et 3°), des combats âpres, la caste pesante et accrocheuse du 6°, la répétition noble du 5° et le vide total au premier tiers. Dans les recoins de mon champ de ruines, j'en oublierai c'est ainsi, Urdiales debout et exultant, vidé et émacié mais vivant, restera comme l’image de ce vélo garé contre une grille de la Calle Ledesma par un ami italien venu pour deux jours, deux jours seulement ; comme les impressions d’une première corrida vécue aux bras d’un amoureux, mordu lui aussi, qui conservera son billet pour édifier son champ de ruines bien à lui à Paris ; comme le vertige de se dire qu’enfin, certains, certaines, prennent un bus au Mans pour rallier la Biscaye, une semaine durant, errance solitaire et grandiose de l’afición a los toros.

Après, le reste, ce qu’il reste, ce sont les mots d’eux tous qui racontent leur monde, le mien, le nôtre, le monde des toros, fil rouge d’une guerre sans fin.


>>> Retrouvez une galerie consacrée à la corrida de Victorino Martín de Bilbao sur le site, rubrique « Ruedos ».